René Lenormand, né le 5 août 1848 à Elbeuf (Seine-Maritime) et mort le 3 décembre 1932 à Paris, est un compositeur français. René Lenormand, ami de Gabriel Fauré, est surtout connu comme compositeur de mélodies, mais le catalogue de ses œuvres ne s'arrête pas là et offre une grande variété. Il fut pédagogue, et il semble que cette activité ait quelque peu gêné sa carrière de compositeur : « Le cas de René Lenormand (1846-1932), auteur de belles mélodies telles Les Fleurs du mal est exemplaire de ce point de vue : ces œuvres ne parvenaient à lui rapporter que quelques centaines de francs par an et il vivait mal de leçons payées trois à cinq francs de l'heure ».
Il a dirigé deux sociétés de musique de chambre actives jusqu'à la Première Guerre mondiale : d'une part, la Société de Musique d’Ensemble fondée en 1885, d'autre par la Société du Lied en tous pays (1907-1914). Cette société musicale, qui avait pour objectif de « répandre les mélodies françaises à l’étranger et faire connaître en France les lieder étrangers », avait pour président d'honneur Gabriel Fauré. Parmi les membres de son comité de patronage, on relève les noms du compositeur Charles Koechlin, du chanteur Lucien Berton, de la cantatrice Suzanne Cesbron, de l’éditeur de musique Alphonse Émile Leduc, des critiques musicaux Mathilde Daubresse et M. P.-H. Raymond-Duval ou du prince Edmond de Polignac.
En 1912, il publia sous forme de feuilleton dans Le Monde musical un traité important, Étude sur l'harmonie moderne, qu'il publia l'année suivante sous forme de monographie. Cette étude musicologique était très originale puisque l'auteur avait pris la peine d'écrire aux compositeurs contemporains vivants pour leur soumettre son analyse de leur œuvre et recueillir leurs avis éventuels. L'intérêt du livre est d'avoir incorporé, dans la mesure du possible, les commentaires des compositeurs contemporains, dont Claude Debussy et Maurice Ravel. Lenormand déclare en préambule de son ouvrage : « Quelques-uns des auteurs cités ont bien voulu nous aider à préciser leurs intentions, et nous leur adressons nos sincères remerciements. Si l'on ne rencontre pas dans ces notes les noms célèbres de MM. Massenet, Dubois, Widor, etc., etc., c'est que ces maîtres, d'un talent incontesté, ont sans doute jugé que les innovations harmoniques dont nous nous occupons, étaient contraires à leurs principes esthétiques, et ne les ont pas employées, sauf de rares exceptions »2. Lenormand analyse de nombreux exemples d'harmonies empruntés à vingt-cinq compositeurs français : Louis Aubert, Alfred Bruneau, André Caplet, Emmanuel Chabrier, Ernest Chausson, Claude Debussy, Paul Dukas, Gabriel Dupont, Ernest Fanelli, Gabriel Fauré, Alexandre Georges, Jean Huré, Vincent d'Indy, Charles Koechlin, René Lenormand, Ernest Moret, Léon Moreau, Maurice Ravel, Albert Roussel, Samuel Rousseau, Camille Saint-Saëns, Erik Satie, Florent Schmitt, Déodat de Séverac et Henry Woollett. Dans une conférence du 19 mars 1916, Koechlin rappelait les difficultés de Lenormand pour éditer son livre : « Aucun grand éditeur de musique ne voulait prendre la responsabilité d'un livre aussi subversif, que condamnaient d'avance les traités d'harmonie qu'ils vendaient, ou les vieux maîtres illustres –convaincus mais incompréhensifs- qu'ils fréquentaient. Malgré tout, la brochure de Lenormand finit par voir le jour [...]. Et elle est aujourd'hui entre les mains de la plupart des Jeunes, qui tiennent pour évidentes et définitives les conquêtes de l'harmonie contemporaine, auxquelles d'ailleurs leur oreille est habituée depuis longtemps [...] à part de vénérables membres de l'Institut dont l'âge excuse ou tout au moins explique qu'ils soient réfractaires aux idées nouvelles. À part ceux-ci, aucun bon musicien ne nierait à présent l'évidence des vérités de l'Étude sur l'harmonie moderne, de René Lenormand. Ce qui est assez curieux, c'est que les jeunes et même quelques mûrs, sont allés beaucoup plus loin depuis ces dernières années ».